Test : Shin Megami Tensei IV : Apocalypse (Nintendo 3DS)

Il est déplaisant de faire le test d'un jeu quand on n'a pas fait l'épisode précédent, et plus encore quand c'est un spin off. Comment aborder le sujet correctement? Faire totalement l'impasse sur l'autre jeu et passer à côté d'éléments cruciaux? Se renseigner en amont quitte là aussi à passer à côté de quelque chose faute de ne pas y avoir joué ? Ou finalement speedrunner le jeu en allant à l'essentiel et de toute façon rater des trucs? Puis il y a des jeux qui te disent : aie confiance, je suis le même, mais en pas pareil, en fait, je fais même mieux ! Tu verras, c'est un univers parallèle. Et bien soit, on va te faire confiance t'as l'air bien sûr de toi petit SMT IV Apocalypse.

Kick my Ases

C'est donc dans un Tokyo sauvé in extremis de l'anéantissement nucléaire, mais isolé, que l'on fait la connaissance de Nanashi, et de son amie d'enfance nommée Asahi (normal pour la fille du barman local). De lui on ne sait pas grand chose en dehors de son goût pour les joggings verts et les crêtes punk, d'elle, on découvre sa forte envie d'émancipation, avec l'objectif de devenir hunter, les chasseurs (et dresseurs) de démons du coin.

Et c'est plus facile à dire qu'à faire dans un Tokyo enfermé dans une sphère plongeant les restes de la ville dans l'obscurité, et poussant les survivants à manger du démon pour survivre (et vu le bruit que ça fait en mangeant, c'est pas de la grande gastronomie). C'est lors d'une bête mission à la recherche de reliques (comprendre les restes de la civilisation perdue, telles qu'un smartphone ou de la patafix) que nos jeunes aspirants, accompagnant deux chasseurs vétérans, vont faire face à des démons de la Goétie bien décidé à casser de l'humain, ce qu'ils feront sans grand effort, laissant notre protagoniste mort. Enfin ça, c'est sans compter sur l'intervention de Dagda le rusé dieu des druides qui a bien l'intention de faire de Nanashi son GodSlayer (pas la peine de crier au spoiler, c'est sur la boite du jeu et c'est quasiment l'intro de ce dernier).

Suite à ça notre héros d'infortune aura fort à faire entre la survie de sa communauté, les batailles entre factions, les anges et les démons qui se servent de Tokyo comme Armageddon, une divine alliance, et sa collection de déités. C'est l'Apocalypse, le titre n'est pas usurpé, et à moins de ne pas supporter les critiques sur la religion (auquel cas, vous vous êtes trompé de série) ça devrait vous occuper pendant un bon bout de temps.

Karmageddon

Et pour être un bon chasseur de démon bi-classé GodSlayer, il faut de bons outils. C'est à l'aide de votre smartphone ressuscité que vous gérez votre menu, et ce dernier est bien rempli. Gestion des pouvoirs de NanaShi et de ses familiers, gestion des objets divers (nombreux et variés), pièces d'équipement, reliques que l'on revend contre des Macca, la monnaie locale etc, gestion des familiers, leur statut, sélection de ceux qui vont au combat avec le joueur, discussion avec ces derniers, sélection du partenaire qui nous soutient au combat, quêtes (principales comme secondaires), base de données, avec bestiaire, notes sur le background, messagerie des compagnons, notes sur les éléments de gameplay, l'application du Mido où l'on fait fusionner nos familiers, le sous menu pour sauvegarder/charger la partie, l'application où l'on redistribue les points de compétences, le sous-menu pour le streetpass, les réglages sonores, et ceux de la difficulté.

Mais le bon chasseur sait qu'il y a une vie en dehors des menus, et s'il ne lâche pas son smartphone pour scanner les environnements qu'il parcourt pour la première fois, c'est bien à pied qu'il les traverse. Et en dehors du confort relatif de la station de Kinshicho, il y a de quoi parcourir, Tokyo, même en ruine, c'est grand (toujours aussi peuplé, mais les passants sont nettement plus agressifs), alors les ruines en question vont limiter l'accès aux divers quartiers, qui se débloqueront au fur et à mesure de la progression du scénario. On y trouvera tout de même coffres, bastons, quelques lieux bonus (souvent pour les missions secondaires) comme les domaines infernaux. Petit à petit on activera des terminaux permettant de se téléporter d'un point à l'autre de la carte.

Les donjons sont principalement des stations de métros, rues, et parcs aux textures sombres, plus ou moins hostiles. On les fouillera pour trouver les artefacts, généralement de petits tas d'ordures ; leur collecte permet de les échanger contre des macca, et plus vous en récupérez, plus les objets qui en sortiront auront de la valeur, c'est l'une des méthodes pour se faire de l'argent. On peut aussi y trouver des coffres contenant des objets de soins/magies et autres, des échelles à grimper, portes à ouvrir, des barricades à trancher à coups d'épée, des pièges à éviter, et autres interactions en guise de puzzles (comme l'utilisation d'un pouvoir accordé à un compagnon).

Quand ce n'est pas l'environnement qui vous agresse, ce sont les ennemis, qui apparaissent sur la carte, parfois se limitant juste à errer sans but, et parfois fondant sur vous, avec une petite icône au-dessus d'eux, et c'est précisément à ce moment là qu'il faudra prendre l'initiative en frappant de l'épée pour avoir la priorité lors du combat ce que l'on verra un peu plus loin. Et quand ça va bien, on peut interagir avec les gens du coin, aussi bien humains que démons, avec qui l'on peut parler (ce qui a généralement comme utilité d'approfondir l'univers du jeu) voire faire du commerce. (particulièrement vrai dans les stations tenues par l'une des factions humaines, et avec peu de démons qui trainent voire aucun). Niveau commerce, on a du classique revendeur d'armes/armures (que l'on voit portées par Nanashi), vendeur d'objets, bar où l'on amène les éléments en rapport aux quêtes fedex, reprend de la vie en mangeant, un démon du nom de Saint Germain qui échange des objets contre des pierres précieuses, un lieu interdimensionnel où l'on peut se refaire une santé contre du macca (le prix augmente à chaque visite) sous fond de musique hippie.

On va s'Mara-ve

Les combats, c'est le job des chasseurs. Classiques pour la série, ce sont des face à face entre Nanashi et des démons. Assez rapidement Nanashi aura la possibilité de se faire accompagner de trois familiers, et d'un compagnon qui en fin de tour (ou à d'autres moment selon l'humeur et la personnalité de ce dernier) porte un coup, soigne, ou utilise un de ses familiers. Au fur et à mesure des combats une jauge se remplit : une fois pleine, tous les membres humains de votre équipe se déchaîneront, l'occasion de causer de gros dégâts à l'ennemi. Si on ne commence qu'avec Asahi, on aura jusqu'à 7 compagnons à la fois, et ça peut être salutaire dans les combats tendus, d'autant qu'ils ne se limitent pas à frapper, mais aussi à donner du bonus et des soins.

Mais ne croyez pas qu'une rencontre avec un démon tourne nécessairement à la baston : avant le combat en lui-même on peut choisir de discuter avec l'un d'eux, et avec une option on peut même les racketter. Les discussions ont généralement le même but, recruter un futur familier, et selon le niveau de notre protagoniste, celui du démon, ainsi que sa personnalité, la discussion peut varier. Certains seront faciles à convaincre, la plupart négocieront avec vous, afin d'avoir macca, objets voire un peu de votre magie ou la vie d'un de vos familiers (ce que l'on peut accepter, refuser, et on peut même mentir et observer leurs réactions), et certains seront incorruptibles, refusant de venir grossir vos rangs (comme les anges que l'on n'obtient que par fusion). Sachez que certains auront eu vent de votre réputation, ce qui aura une conséquence sur le recrutement. Parfois, quand vous leur en mettrez plein les dents lors d'un combat, des démons imploreront votre grâce, le bon moment pour les racketter voir les convaincre définitivement que devenir votre allié est finalement une bonne idée (et certains vous testent au combat, seule condition pour qu'ils vous rejoignent). On se retrouve parfois avec des situations un peu folles, comme un Fenrir qui, après avoir quitté un combat afin de chercher un os que vous avez jeté, reviendra pour se joindre à vous, car il vous trouve amusant ; oui, le loup du Ragnarok est finalement un bon toutou en mal d'affection.

Et si on choisit la voie létale ? Nanashi a le choix entre attaquer à l'épée, avec une arme à feu, dont les effets diffèrent selon l'arme choisie, utiliser un sort après un contact avec ses familiers, utiliser un objet, changer de familier, passer son tour, fuir, ou discuter, car la voie diplomatique est toujours possible (avec une efficacité variable, certains n'aiment pas que l'on tue leurs compagnons). A leur tour, on choisit l'action qu'effectueront les familiers, qui n'ont pas accès à l'inventaire ou au dialogue, puis vient le tour de l'ennemi, et rebelote jusqu'à la fin de la rencontre.

Mais un bon combattant ne se contente pas de bourrer le pif de son adversaire jusqu'à ce qu'il tombe (ça c'est Tekken), non, il faut apprendre à connaître les affinités élémentaires de son adversaire. Chez certains c'est évident : un Jack Frost ne va pas apprécier le feu, alors qu'un Pyro Jack va y être immunisé. En exploitant bien les faiblesses de ses adversaires on peut gagner un tour supplémentaire (ce qui arrive aussi parfois quand on porte un coup critique), en revanche frapper avec le mauvais élément peut nous faire perdre un tour, voire en faire gagner un à l'ennemi, qui lui aussi bien évidemment cherchera à frapper là où ça fait mal, bref connais ton ennemi comme toi même.

Une fois la victoire remportée, on récupère XP, macca et objets, classique, et à force d'XP on monte de niveau, classique toujours (ce qui est bien sûr valable pour notre avatar, ses familiers et compagnons). La progression des compagnons est classique, avec déblocage de pouvoir qu'ils utiliseront lors des combats (voire de nouveaux familiers pour Asahi). Les familiers ont une évolution plutôt classique aussi, sauf que quand ils débloquent de nouveaux pouvoirs, ils vous en proposeront certains, c'est de cette manière que l'on apprend la magie.

Parfois en montant de niveau, certains émettent le désire d'évoluer, (courant chez les anges qui grimpent dans la hiérarchie angélique) devenant plus fort, c'est de cette façon que Hequet peut évoluer en Dzelarhons par exemple. Quand à Nanashi ils obtient cinq points de statistiques qu'il doit répartir dans les cinq types existants, à savoir :

- la force qui joue sur les aspects physiques et la force de frappe à l'épée,
- la dextérité, qui elle touche à l'utilisation de l'arme à feu,
- la magie, sur la magie évidemment,
- l'agilité, elle, affecte la vitesse d'attaque voir régit qui passe et dans quel ordre, et la possibilité de fuir le combat,
- la chance, pour avoir plus de coups critiques, et améliorer la possibilité de recrutement.

Mais l'on récupère aussi dix Apps Points (que l'on récupère parfois en scannant des cadavres, sympa) à dépenser dans une application permettant de débloquer des skills très intéressantes voir indispensables. C'est de cette manière que l'on peut avoir plus de familiers, récupérer nos points de magie en marchant, disposer de plus de pouvoirs, récupérer MP et HP en montant de niveau, avoir l'option de dialogue pour racketter les démons etc. L'équipement utilisé a aussi son effet, ainsi une armure peut aussi bien protéger d'un élément que rendre plus sensible à un autre, mais aussi booster les PM ou l'agilité. Les armes peuvent bien sure frapper plus fort, mais aussi concentrer l'attaque sur un ennemi, ou en frapper plusieurs.

Autre élément fondamental de la série, les fusions. Recruter des familiers et les faire progresser c'est bien, les faire fusionner c'est encore mieux. Là entre en jeu la cathédrale des ombres où nos chers familiers peuvent devenir encore plus puissants en donnant un nouveau démon. Certains ne peuvent être obtenus que de cette manière, il faut donc recruter pour trouver les combinaisons qui vont bien, et dans certains cas, on peut même accéder à des fusions spéciales embarquant plus de deux familiers, et permettant d'avoir les déités les plus puissantes du jeu.

Qui plus est, un démon recruté peut être racheté via la cathédrale des ombres, utile pour encore plus de fusions. Au final le jeu pousse le joueur à réfléchir à la manière dont il va aborder les combats et le jeu en général. Augmenter les statistiques de chance afin de recruter plus facilement des démons, qui en retour donneront accès aux pouvoirs désirés, ou complèteront nos faiblesses, tout en dépensant des AP pour que la magie des familiers soit moins coûteuse et de fait pouvoir plus souvent les utiliser ; porter l'armure protégeant de la glace sachant que le lieu que l'on traverse est plein de démons de cet élément, afin de briser leur tour et en récupérer au passage... Les possibilités sont nombreuses, donnant de quoi s'adapter aux épreuves en créant une synergie, et c'est bien là la finalité : ne faire qu'un avec ses familiers/son équipe, renforçant encore plus cettes ambiance où l'on ne sait pas toujours vraiment qui utilise qui de Nanashi ou des démons, un petit goût d'interdit franchi en fricotant avec l'occulte, une impression de pouvoir et de magie.

Ragna rock n'roll

Et techniquement ça tient la route? En reprenant les assets de Shin Megami Tensei IV il y a intérêt. Et effectivement pas de ralentissement ou de bug à déplorer. On parcourt les mêmes lieux (mais avec des nouveaux), on a les mêmes musiques (mais avec des nouvelles), on croise des protagonistes/antagonistes du précédent (mais y'a des nouveaux), on peaufine le gameplay, bref, ça recycle pour raconter une nouvelle histoire, et ça le fait bien. Ce qui fonctionnait précédemment fonctionne toujours, en corrigeant les défauts au passage. Ça c'est pour ceux qui ont fait SMT IV, pour les autres, c'est la découverte.

Alors certes, parcourir Tokyo en ruine et ses stations de métro-refuges c'est pas le grand dépaysement (surtout quand vous bouffez des jeux Tokyo-centrés à longueur d'année), mais il y a tout de même des lieux qui sortent du lot. Certains sont très "organiques" mais laissons le plaisir de la découverte. Si Nanashi est assez finement modélisé et animé, les environnements, eux, sont coupés à la serpe avec des cadavres qui ressemblent plus à des tas d'ordures qu'à des corps humains, et ce n'est pas voulu. Ça se passe mieux lors des combats, avec les habituels esprits du bestiaire astucieusement animés, avec quelques nouvelles têtes ; on sent que des efforts ont été faits pour les rendre vivants, là où les environnements hors combat sont plus fonctionnels. Concernant la musique là encore ce sont les combats et les personnages qui ont eu le plus droit aux nouveautés. Du mystérieux et inquiétant thème de Dagda, au menaçant Polytheistic Alliance et son petit air de flûte soulignant la malice de l'instigateur de tout ça, en passant par le mélancolique Asahi, c'est une bonne trentaine de morceaux d'ajoutés.

On peut utiliser l'écran tactile de manière très classique, la 3D est anecdotique, et il n'y a toujours pas de traduction en Français. L'anglais est cependant compréhensible pour quelqu'un qui a un niveau scolaire. Côté doublage, les voix correspondent généralement bien aux protagonistes, et même si certains accents texans dans un contexte si japonais nous font regretter la VO, l'effort a été réel pour ne pas américaniser avec des références hors de propos. On peut également importer sa sauvegarde de SMT IV. Bref, le minimum syndical habituel d'Atlus de ce côté là.

Born to be a god slayer

Une histoire bien menée avec son lot de rebondissements, un gameplay riche qui pousse au reviens-y, ne serait ce que pour remplir le bestiaire, une réutilisation intelligente des assets de SMT IV, des corrections et ajouts bien vus, il n'y a décidément que le dernier donjon, abusivement long avec des boss par paquet de dix (littéralement) qui assombrit le tableau. Si vous aimez les RPG avec un solide univers aux influences mythologiques, ou tout simplement la série, les seules raisons de ne pas vous le procurer restent le manque d'argent ou/et de temps.

Verdict

8

Points forts

  • Le gameplay
  • La musique
  • L'histoire
  • L'ambiance

Points faibles

  • Le dernier donjon
  • Pas de VF
  • Le dernier donjon
  • Pas de VO non plus
  • Le dernier donjon

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