Test : Football Manager 2017 (Windows, Mac, Linux)

L'année footballistique aura été bien chargée. L'Euro qui passe à un poteau près, le rachat de l'OM dans un feuilleton à rebondissements où la presse a montré son incompétence à donner des infos fiables, la surprise Leicester ou la Chine qui recrute comme si elle utilisait un cheat code, on n'a pas eu le temps de s'ennuyer.

Comme chaque année, c'est donc plus de deux mois après le début de saison que Sports Interactive sort son nouveau Football Manager. Les questions rituelles se reposent : est-ce une vraie évolution ou une simple mise à jour à 55€ ? Le moteur 3D pourra-t-il enfin concurrencer FIFA graphiquement ? Notre joueur préféré sera-t-il évalué correctement ? Et surtout, est-ce qu'on sera encore obligé de se retaper les mêmes conférences de presse en boucle ?

FM Touch à ton porte-monnaie

Passons tout d'abord rapidement sur ce qui me semblait inutile dans les versions précédentes : FM Touch. Gros changement : alors qu'il était précédemment intégré au programme, FM Touch 2017 est maintenant un jeu à part entière avec sa propre page Steam. Si j'apprécie l'idée de séparer les versions, jusqu'à l'an dernier on avait l'ensemble pour le même prix. C'est aujourd'hui 29,99€ supplémentaires qu'il faudra débourser si l'on souhaite posséder les deux jeux, ou l'avoir précommandé.

Pour avoir fait rapidement le tour, les différences sont moins flagrantes et l'expérience est plus agréable que sur les versions précédentes grâce à l'interface adaptée mais on est toujours dans une version ultra-light de FM, avec ses scénarios, l'absence de gestion de groupe et sa boutique à cheats payants (pas implémentée dans la version beta).


Moi, moche et incompétent

Rentrons ensuite dans le vif du sujet. Il est possible de créer sa propre équipe à partir de rien, à l'aide de l'éditeur fourni ou de se lancer dans le grand bain avec les équipes et les joueurs réels. La prochaine étape sera invariablement de se créer un profil d'entraîneur.

La création d'avatar avait été un moment fort de la version 2016. Il était difficile de ne pas tomber dans le ridicule au vu des possibilités offertes. En soi l'idée n'était pas mauvaise même si elle manquait d'intérêt pratique, donc je veux bien lui laisser une deuxième chance. Moins de modèles différents, moins d'aberrations esthétiques, des détails comme les cheveux qui grisonnent si le personnage est âgé, bref, c'est mieux. Ce n'est pas bien fait, ce n'est pas joli et ça n'a toujours qu'un intérêt limité, mais c'est mieux.

De la même manière, les portraits des joueurs et staff générés par le jeu sont plus présentables. Par contre faites attention : l'avatar que j'ai créé apparaît maintenant sur le menu principal au lancement du jeu. Si vraiment vous faites un truc moche, on vous le fera payer en vous obligeant à l'admirer. Donc faites sobre, le jeu est rancunier.

La suite est ultra classique, les pays jouables sont toujours les mêmes, on choisit si on souhaite commencer sans club ou directement à la tête du Real ou du Bayern, et c'est le début de carrière. Commencer sans emploi vous lancera sur la piste du moindre poste vacant avec des entretiens à passer qui sont sensiblement les mêmes que dans les versions précédentes et qui étaient un ajout bienvenu.

Pour rester dans mes bonnes habitudes, je commence avec l'US Orléans. Pour le principe, je me suis fait prêter Enzo Zidane, histoire de l'associer avec Karim Ziani. Un ancien nouveau Zidane avec le vrai nouveau Zidane, la classe (l'un des deux finira avec plus de quinze buts marqués en championnat, saurez-vous deviner lequel ?). Par contre, quand j'ai vu le reste de l'effectif, je me suis dit que ce n'était pas gagné pour pratiquer un football champagne.


L'interface de retour, mais de position de hors-jeu #ArbitrageVidéo

Commence alors la phase de découverte de l'interface, un grand moment chaque année. Et c'est clairement une déception. Rien n'a changé, les barres latérales et verticales ont toujours les mêmes fonctions et dans tous les domaines : infos club, transferts et recherche de joueurs, module tactique, finances, conférences de presse... C'est une réutilisation pure et simple de l'interface de FM16. Ce n'est pas qu'elle était mal foutue mais elle aurait mérité des ajustements. Ce ne sera pas pour cette année.

Allez, j'abuse un peu, je dois évoquer l'onglet " réseaux sociaux ". Petite nouveauté donc, on suit l'actualité comme sur Twitter, on reçoit les infos concernant les personnes ou les clubs auxquels on s'est abonné et même si les supporters ont tendance à réagir trois fois par info en mode " positif / négatif / ne se prononce pas " (ce qui semble être lié à la version beta, sinon ça n'a aucun intérêt) c'est une idée intéressante, surtout qu'on peut cliquer sur les hashtags pour ouvrir les pages liées. Si l'info concerne la performance d'un joueur pendant un match, le commentaire sera accompagné des hashtags du joueur et du match, pratique pour rapidement naviguer.

Le recrutement se voit enrichi d'une phase de négociations supplémentaire, sur base de promesses sur le poste occupé ou le renforcement de l'effectif sur un domaine précis. De la même façon, on trouve maintenant la possibilité de négocier avec son joueur le prix de son départ s'il souhaite réellement partir. Ajout qui rajoute une touche de réalisme bienvenue.

Par contre, ça va vraiment devenir frustrant de voir qu'il ne semble pas sauter aux yeux de Sports Interactive qu'un système d'onglet serait parfaitement adapté au jeu. Ouvrir deux fiches de joueurs et les comparer plus facilement qu'avec le système intégré, un vœu qui sera peut-être exaucé quand les développeurs auront découvert un navigateur Internet.

Il y a bien un effort d'ergonomie avec les suggestions et avis des recruteurs, des préparateurs et de l'adjoint à valider directement dans la messagerie, mais entre la boite et les réseaux sociaux, j'aurais bien vu plusieurs onglets avec chaque type de sujet : transferts, conférences de presse, blessures... pour bien différencier les messages. On peut toujours filtrer les messages mais c'est se rajouter une manipulation d'une complexité inutile.


Stagnation dans l'approximation

On note aussi l'apparition d'un nouveau rôle dans le staff : l'analyste de données, qui sera en charge de vous fournir des statistiques sur les matchs joués. Un peu gadget mais prendre le temps de se pencher dessus pourra permettre de mettre en évidence certains dysfonctionnements sans pour autant vous donner une solution au problème. Je ne sais pas si le partenariat avec Prozone concernant les statistiques est renouvelé puisque le logo n'apparaît pas dans la beta. À vérifier.

Au rayon des trucs ratés depuis des années, la page des finances est toujours aussi bordélique. Basée sur des calculs mensuels et toujours pas selon un budget annuel, elle ne permet pas d'isoler les éléments et ne permet aucun ajustement. Ce n'est pas forcément irréaliste, même un manager en total contrôle d'un club n'a pas la main sur le prix des billets, mais on reste dans un jeu et il serait sympa d'avoir la possibilité de faire grandir un petit club sans être obligé de remporter la Ligue des Champions dans son stade champêtre et ses 1 000 spectateurs.

L'onglet " historique " des joueurs continue, imperturbable à sa propre incohérence, à ne présenter que les statistiques en championnat ou à considérer de la même façon les titularisations et les entrées en jeu ainsi que les matchs en équipe première et en équipe réserve. Inutile de dire que le total est complètement faussé. Il faudra donc retourner cliquer sur chaque ligne pour enfin voir l'intégralité des performances.

On refait les matchs mais pas trop

Bon je me plains et je cherche la petite bête, mais vu que l'interface est identique, je dois bien trouver des choses à dire. Heureusement c'est l'heure de notre premier match. Le module tactique n'a pas changé, je mets donc rapidement sur pied une équipe et une animation offensive en place. J'appréciais cette clarté dans les choix possibles dans le dernier épisode, là je regrette un peu que rien n'ait évolué. Mais pas le temps de tergiverser : c'est l'heure de l'entrée sur la pelouse et je suis doublement surpris.

Déjà parce que j'ai oublié de désactiver le son et que les trente pèlerins qui viennent assister au match amical de préparation contre une D4 belge font plus de bruit qu'Anfield Road, et ensuite parce que chaque début de match est maintenant précédé d'une animation. Les entraîneurs se serrent la main, les joueurs se mettent en ligne face aux tribunes, bref, un petit peu de cérémonial sympathique. Les premières fois. A la dixième, le côté inutile et répétitif saute aux yeux. Mais saluons l'initiative en oubliant que des choses bien plus fondamentales auraient pu être travaillées au lieu de faire ça.

Visuellement, peu de changements ; c'est peut-être un peu plus propre, les joueurs mieux modélisés, les mouvements plus fluides, mais globalement on n'est pas encore devant un beau spectacle comme savent le faire les simulations manette en main. Sports Interactive annonce 1500 nouvelles animations, c'est possible, mais en match la différence n'est pas flagrante. Le contenu est quant à lui quasiment identique à la version précédente, les angles de caméras disponibles sont un peu plus variés mais les actions se ressemblent, les comportements sont toujours un peu bizarres, les gardiens attendent toujours debout que l'attaquant marque en situation de un contre un, un centre sur trois est raté mais manque de se transformer en but en pleine lucarne et les célébrations sont toujours aussi ridicules...


Cause toujours

C'est bien le Football Manager que l'on connaît, celui qui simule des matchs qu'heureusement personne ne verra jamais dans la réalité parce que ce serait inquiétant pour la santé mentale et motrice des joueurs. On peut tout de même noter l'apparition des traces de la bombe de mousse de l'arbitre sur les coups francs et de nouvelles phrases de commentaire ; si, vous savez, ces phrases qui sont censées décrire l'action et qu'on ne lit jamais vraiment pendant les matchs. Mais un peu de renouvellement, ce n'est pas si fréquent, autant en profiter même si ça ne vient pas transcender l'expérience de jeu.

Les consignes n'ont pas changé, les causeries non plus, que ce soit celles d'avant match, de la mi-temps ou de fin de match, avec toujours les mêmes recettes à l'efficacité floue. Il serait quand même temps de faire un effort à ce sujet, car entre le laisser à l'adjoint qui raconte toujours un peu n'importe quoi et le faire soi-même au prix d'un ennui croissant, le choix n'est pas satisfaisant.

J'ai évoqué les conférences de presse à plusieurs reprises, elles souffrent du même problème que les causeries. Répétitivité, j'écris ton nom en boucle. Alors quelques petites nouvelles phrases sont bien présentes, mais quand on viendra vous saouler plusieurs fois par semaine avec la même question, vous finirez vous aussi par détester les cinq propositions pour y répondre. On aimerait parfois plus de nuance, ou à défaut plus de cohérence entre la situation d'un club ou d'un joueur et les questions que l'on nous pose. Un moyen détourné de se moquer des journalistes sportifs et de leurs analyses répétitives ?

Le Brexit excite

Un ajout notable tout de même : le Brexit. Plusieurs scénarios sont possibles et c'est bien la première fois que Football Manager se permet l'audace d'envisager un changement des règlements en cours de partie. La date de l'événement devrait être aléatoire, entre deux et dix saisons après le début de partie et les clubs britanniques verront peut-être les conditions d'obtention des permis de travail changer. Il existe trois scenarii envisageables, dont un qui verra maintenue la libre circulation des travailleurs au sein de l'UE et un autre qui permettra aux footballeurs d'être considérés comme des salariés du divertissement et facilitera leur obtention d'un permis de travail.

Le dernier est le plus contraignant : il obligera les joueurs ressortissants de l'Union Européenne à obtenir des permis de travail sans aucune facilité. Ce scénario devrait changer un certain nombre de choses, à commencer par le nombre d'étrangers dans les clubs. Mécaniquement, les nationaux auront plus de valeur puisque plus rares et les meilleurs joueurs seront bien plus convoités.

L'initiative est intéressante : tenter de coller à l'actualité est louable, il reste à voir les conséquences en jeu pour les championnats d'outre-Manche et à quel point la réalité rattrapera les scenarii envisagés. J'avoue ne pas avoir, malgré mes quarante heures de jeu, atteint ce moment tant attendu. Le précédent est encourageant, cela pourrait signifier qu'à l'avenir des changements aléatoires pourraient être intégrés au jeu pour simuler l'évolution des footballs nationaux. Nombre de clubs par division, règles de promotion / relégation (qui viennent de changer pour la Ligue 2 en France), droits TV...


Prise de risque minimale pour assurer le résultat

Pourquoi ne pas imaginer même de simuler les instances en charge de ces questions par des personnages en jeu qui auraient chacun leur politique sur ces sujets, comme il existe des entraîneurs ayant des systèmes de jeu préférés ? Et que les élections de ces responsables soient intégrées au jeu, aux conférences de presse où les managers pourraient s'exprimer ?... Je m'emballe mais je regrettais l'an dernier l'immobilisme de Football Manager, je ne peux qu'apprécier l'effort et espérer qu'il soit approfondi.

Je ne suis pas déçu de la qualité de cet opus mais je ne peux que constater que Sports Interactive reste dans sa (défense en) zone de confort. J'ai rarement eu autant l'impression d'avoir le même programme sous les yeux et les quelques changements ne viennent pas transformer mon expérience de joueur. Un fan qui possède la version 2016 ne verra pas forcément d'amélioration fondamentale, à part les bases de données correctement mises à jour cette fois (ce qui m'a permis de retrouver mon médecin traitant dans le staff médical d'un club de Ligue 1).

Repasser à la caisse pour celui qui a déjà craqué sur FM2016 me semble en l'état difficilement justifiable à part pour les fanatiques d'anticipation britannique ou les accrocs à Twitter qui voudront profiter de l'apparition des réseaux sociaux dans le jeu. Pour un débutant sur la série ou un ancien pratiquant qui veut se remettre à jour, FM2017 est bien évidemment la meilleure version disponible et reste une valeur sûre. Mais Sports Interactive semble réticent à faire réellement évoluer son bébé, à se débarrasser de ses derniers défauts et se contente d'assurer le coup, profitant du fait d'être sans opposition crédible sur le créneau.

Verdict

7

Points forts

  • Toujours LA simulation de club de football
  • Dangereusement addictif
  • L'intégration des réseaux sociaux qui facilite la navigation
  • Négociations approfondies
  • Moteur graphique plus détaillé<b

Points faibles

  • Interface identique
  • Module tactique inchangé
  • Toujours pas d'onglets pour naviguer
  • Moteur de match toujours aussi peu réaliste
  • Conférences de presse et causeries

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