Test : Endless Space 2 (Windows, Mac)


Endless Space 2

Allez, je termine cette recherche technologique et je pourrai coloniser ce système. Dans trois tours, j'aurai construit cette merveille et je relancerai la production de vaisseaux pour punir le vilain qui m'a détruit mon unité d'exploration. Après ça, j'aurai assez de thunes pour engager un héros qui pourra prendre la tête de ma flotte et se faire élire au sénat pour m'apporter des bonus, mais je dois aussi faire gaffe au voisin qui commence à s'installer trop près de chez moi... Bienvenue dans un 4X d'Amplitude Studios.

Les auteurs français de la franchise Endless ont mis un grand coup de pied dans la fourmilière des jeux de gestion au tour par tour dans l'espace avec leur premier jeu, Endless Space. Doté d'une ambiance graphique et sonore envoûtante, d'une interface d'une simplicité d'utilisation remarquable et truffée de bonnes idées, il n'avait comme petits défauts qu'une opposition limitée avec une IA assez simple à contrer et un mode multijoueurs parfois instable.

Ils ont récidivé avec Endless Legend, qui se déroule plutôt dans une ambiance médiévale fantastique à l'échelle d'une planète. Se rapprochant d'un Civilization sur ce point, il proposait de nouveaux concepts en conservant son interface intelligente et son ambiance originale. N'oublions pas Dungeon of the Endless, un rogue-like très bien pensé et particulièrement velu, qui prend place dans l'univers déjà développé précédemment.

Après quelques années d'attente, ils se sont lancés dans le développement de la suite d'Endless Space, évidemment nommé Endless Space 2. Depuis son arrivée sur Steam en Early Access à l'automne 2016, le jeu a considérablement évolué, que ce soit visuellement ou sur certains concepts. Après avoir sollicité la communauté pour la création de factions notamment, Amplitude a finalement déclaré ES2 officiellement sorti en mai 2017.

Présenter tout ce que propose ES2 nécessiterait des pages et des pages, tant les éléments sont nombreux. Tout d'abord, le principe du jeu est de dominer la galaxie, ce qui peut se faire de différentes façons. Recherche scientifique, domination militaire ou encore production massive de brume, certaines sont d'ailleurs plus adaptées à certaines races. Pour cela, vous allez coloniser l'espace, système solaire après système solaire, construire des bâtiments sur les planètes et y exploiter des ressources. C'est le modèle classique des 4X, mais si Amplitude ne l'abandonne pas, il tente de donner à chaque race sa propre personnalité.

D'ailleurs on constate qu'il ne s'agit pas exactement d'une suite ; certaines factions ont changé depuis le 1, les planètes n'ont plus les mêmes caractéristiques, l'univers a subi une réécriture pour proposer une nouvelle ambiance plutôt que de reproposer la même expérience. Mais même si vous n'avez pas connu le premier, vous découvrirez un background intéressant sans être révolutionnaire, avec ses humains industriels avec un balai bien placé, ses insectes-guerriers implacables mais qui savent tout de même communiquer ou ces arbres qui étendent leurs branches à travers l'espace.

Les différences de gameplay qu'implique le choix de chaque faction sont plus ou moins importantes et le background tente d'expliquer leur expansion à partir de leur planète de départ avec de bonnes idées de narration (parce qu'objectivement, justifier qu'à travers la galaxie, différentes races décident au même moment d'aller visiter l'espace, je reste circonspect). Si toutes ne sont pas originales, elles sont toutes intéressantes à jouer.

La phase de développement de son empire est très complète ; on débloque des améliorations de systèmes par la recherche technologique, on optimise le rendement en déplaçant la population ou en terraformant les planètes, on explore des "curiosités" pour y trouver des ressources stratégiques et on cherche également à posséder les systèmes les mieux situés dans l'univers. Des mécaniques simples mais imbriquées les unes dans les autres qui donnent une richesse de possibilités très satisfaisante.

La recherche technologique reprend la structure déjà vue dans le premier opus, en y ajoutant des petites particularités et surtout beaucoup de nouvelles possibilités par recherche. On a vraiment l'impression que chaque découverte peut influer sur différents éléments du jeu et on planifie à l'avance comment on va orienter sa recherche en fonction de ses besoins. Organisé en quatre domaines composé chacun de différents paliers, l'arbre technologique peut sembler intimidant et complexe mais on s'y fait. Vous passerez tout de même du temps à le consulter lors de vos premières parties pour bien l'assimiler.

Les combats, qu'ils soient spatiaux ou terrestres (qui servent à capturer des systèmes entiers), ont subi de gros changements. Tout d'abord, en cas de confrontation spatiale, ils se déroulent en une phase durant laquelle on va organiser ses vaisseaux sur le centre et les flancs, puis jouer une carte tactique qui apportera bonus et indiquera la distance d'engagement de sa flotte. La baston est observable dans une phase non interactive qui vous laissera impuissant devant la victoire comme la défaite. C'est très joli à regarder, mais je m'en suis lassé assez vite et je préfère zapper la bataille pour arriver directement au résultat.

Tout dépend donc de comment on va construire sa flotte. Pour cela l'outil de personnalisation des vaisseaux est à votre disposition. Maximiser les armes à projectiles ou à énergie ? Se concentrer sur la vitesse de déplacement ou les modules de défense ? Chaque design de vaisseau vous permet une certaine liberté pour vous adapter aux différentes menaces. Un de vos adversaire se bat avec des missiles, mais l'autre vous noie sous les rayons laser ? Vous pouvez construire différents modèles afin d'être efficace sur chaque front, et évidemment faire évoluer vos flottes pour surprendre l'ennemi.

Si cette phase n'est pas la plus aisée à appréhender, elle est tout de même profonde. Le contrôle que l'on a sur le combat est limité mais décisif ; si vous demandez à vos vaisseaux armés pour le combat rapproché de rester à distance, vous ne profiterez pas de toute leur efficacité, et inversement. Mais le plus important restera d'augmenter la capacité de chaque flotte. Vous ne pouvez en effet engager qu'un nombre limité de vaisseaux par flotte, qui se battront les unes après les autres ; vous pouvez disposer de plus de vaisseaux de combat que l'ennemi mais si vous les envoyez par petits groupes ils n'auront que peu de chances de le submerger.

Un des choix qu'a fait l'équipe d'Amplitude est d'adopter le tour par tour simultané. Cela signifie qu'au début de chaque tour, c'est la course au déplacement de ses unités sur la carte de la galaxie pour ne pas se faire doubler, ce qui est relativement peu contraignant en début de partie mais peut vite devenir fastidieux lorsqu'on doit jongler sur plusieurs fronts. Cela permet toutefois un dynamisme appréciable qui évite à chaque joueur d'attendre sagement que les autres daignent bien terminer leur tour, surtout en multi (mais on peut instaurer un timer pour éviter de s'endormir).

Et l'IA dans tout ça ? Elle va bien, merci pour elle. Disons simplement qu'elle offre un challenge certain, interagissant de façon relativement cohérente avec les autres factions et n'hésitant pas à vous menacer ou à vous lécher les bottes quand ça l'arrange. On peut regretter cependant une certaine rigidité dans les propositions diplomatiques, sa capacité à parfois accepter la paix à moindre prix ou l'impossibilité de gérer correctement une alliance. Mais sans être un chef d'oeuvre d'intelligence retorse, elle ne se contente pas de servir de faire valoir au joueur pour lui donner l'impression d'être intelligent.

Une ombre a toutefois plané sur le jeu à sa sortie : un bug particulièrement pénible qui empêchait de terminer des parties n'avait pas été anticipé par Amplitude, mais il a depuis été résolu. Ils se sont fendus d'une lettre d'excuses, mais le premier contact du public en a forcément pâti. Je ne suis personnellement pas friand des patchs qui suivent immanquablement les dates de sortie "définitives" d'un jeu et malgré le souci du détail qui transparaît de chaque pore d'Endless Space 2, la première collaboration entre SEGA et Amplitude n'aura pas su esquiver les problèmes. Dommage. Il semble toutefois que les soucis majeurs soient désormais surmontés, bien qu'il reste quelques imperfections qui nécessiteront encore quelques patchs.

Les quêtes qui vous offrent des récompenses quand vous en remplissez les conditions, la gestion des ressources stratégiques ou de luxe, le fait de devoir gérer avec un sénat qui permet de mettre en place différentes lois, la gestion des héros qui apportent de puissants bonus aux systèmes qu'ils gouvernent ou aux flottes qu'ils commandent, l'existence de planètes uniques ou pourvues d'anomalies positives ou négatives, les trous de vers qui accélèrent l'accès à certains ensembles de systèmes, la liste de trouvailles de gameplay est trop longue pour être détaillée. Mais l'ensemble donne un jeu particulièrement riche et très équilibré malgré la diversité des factions et des mécanismes.

Du point de vue technique, c'est un quasi sans faute. Visuellement, le jeu est très clair, très lisible une fois que l'on a assimilé les différentes icônes et on comprend très vite le rôle de chaque élément. En plus de cela, il se permet d'être particulièrement beau. Les musiques sont une grande réussite également, l'OST s'écoute sans trop de lassitude et les effets sonores ne sont ni pénibles ni envahissants.

Si on ajoute à ça une interface toujours aussi agréable à manipuler (malgré des parties moins réussies, comme l'interface de construction des systèmes solaires), on se retrouve avec un jeu envoûtant, qui ne cache pas derrière de belles images la pauvreté de son gameplay, au contraire. Quasi-sans faute ? Oui, parce qu'il vous faudra une machine tout de même bien pourvue pour en profiter pleinement. Surtout en fin de partie, où Endless Space devient particulièrement exigeant en ressources, et les temps de chargement peuvent s'allonger.

Leur premier opus avait déjà conquis le public avec ses nombreuses idées et sa réalisation très propre, ce deuxième volet vient enfoncer le clou avec un jeu riche, intelligemment pensé et parfaitement réalisé. On sent l'influence d'Endless Legend qui a amené certains concepts avec lui, notamment avec les quêtes, la gestion des héros ou des ressources. On ressent surtout l'envie de bien faire et de proposer une expérience de jeu cohérente tout en restant accessible aux joueurs occasionnels avec son tutoriel facile à appréhender ou son interface fluide à l'usage. Disponible pour 40€ sur Steam, les amateurs de stratégie en tour par tour y trouveront leur bonheur et peuvent s'y jeter les yeux fermés, même si ce serait dommage vu la qualité des graphismes.

Verdict

9

Points forts

  • Réalisation visuelle et sonore
  • Profondeur des mécanismes
  • Factions au gameplay unique
  • L'interface est un modèle du genre
  • IA très correcte
  • Richesse stratégique

Points faibles

  • Demande un PC puissant, surtout en fin de partie
  • Diplomatie un peu limitée

Commentaires

Merci pour ce test.
Il confirme que ce jeu est sublime.
Je pense bien m'y lancer quand j'aurais du temps.
Mais ça ne devrait pas tarder vu comment ce jeu mérite d'être soutenu.